La crise sociale et écologique que nous traversons n’est pas une fatalité. Douze personnalités présentent sul le Alternatives économiques chacune une mesure concrète pour y mettre un terme, de una taxe carbon à l’élimination des paradis fiscaux.
La transition écologique n’est pas une option. Les périls en cours et à venir liés au changement climatique et à l’effondrement de la biodiversité doivent être conjurés sans attendre. L’engagement des citoyens est essentiel, mais l’appel à la vertu ne suffit pas.
En effet, un citoyen qui ne mangerait plus de viande, ne prendrait plus l’avion, se chaufferait à 17 °C…, ne ferait pas baisser, par ces seuls changements de consommation, son empreinte carbone de plus de 25 %. Sachant que de tels « héros » ne sont guère nombreux, il est impossible d’atteindre ainsi l’objectif de neutralité carbone en 2050, qui suppose une baisse de plus de 80 % de l’empreinte de tous les citoyens. Il faut donc des investissements publics et privés dans les infrastructures (urbaines, de transport, de production d’énergie décarbonée, de réseaux, de gestion de l’eau et des déchets), la rénovation des bâtiments, l’industrie, la transformation de notre modèle agricole, la gestion durable des forêts et des espaces naturels, la recherche et le développement…
En Europe, on peut estimer les besoins d’investissement à 1 300 milliards d’euros par an. Il faut d’abord verdir l’investissement existant (1 000 milliards). Mais ça ne suffira pas : il faut 300 milliards de plus. Il faut donc accroître l’investissement public et l’aide publique à la rentabilisation de l’investissement privé 1. C’est possible : l’épargne mobilisable est abondante.
Force majeure. L’application des règles de calcul du déficit public dans le cadre de l’Union européenne est actuellement défavorable à l’investissement public, traité comme une dépense courante et coupé en priorité. De fait, l’investissement public net est devenu négatif en Europe. Le patrimoine public n’est plus renouvelé. Pourtant, les traités européens ont une souplesse qui permet d’interpréter la règle des 3 % de déficit en cas de force majeure, ce qu’est à coup sûr le changement climatique.
Quant à la dette publique, c’est aujourd’hui un problème surestimé. Celle des Etats-Unis dépasse les 100 %. Au Japon, le seuil des 250 % a été franchi sans que cela provoque de réaction. Rappelons que les investissements publics ont un effet multiplicateur sur le PIB. Par ailleurs, pour la zone euro dans son ensemble, les taux d’intérêt n’ont jamais été aussi bas, ce qui contribue mécaniquement depuis 2015 à réduire le taux d’endettement d’environ 1 point de pourcentage du PIB par an. Enfin, l’appétit des investisseurs pour cette dette n’a jamais été aussi élevé. Il est donc urgent et possible de lancer un Green New Deal au niveau européen.